Le 1er juin 2008 nous avons massivement refusé la « gestion moniste » de nos hôpitaux publics. En d’autres termes, nous avons considéré que la gestion des subventions cantonales à la médecine hospitalière ne devait pas être confiée aux assureurs.
Cette défaite des assureurs maladie dans leur processus de prise de pouvoir au niveau de la santé en Suisse, n’est que partie remise, car la solution de rechange est déjà sous presse.
Le 21 décembre 2007, en effet, l’Assemblée fédérale a approuvé l’introduction du DRG (Diagnosis Related Groups) qui n’est autre que le forfait par cas en fonction du diagnostic (il est vrai que les programmes indigestes passent mieux en anglais).
En d’autres termes, le système actuel, dans lequel les hôpitaux sont rémunérés, lors des séjours stationnaires, en fonction des jours d’hospitalisation, par un forfait journalier, sera remplacé dès 2012 par un forfait par cas.
A titre d’exemple, on considère qu’une appendicite doit coûter 3000 francs, quelle que soit la durée du séjour, et c’est donc cette somme forfaitaire qui sera versée. L’hôpital aura donc tout intérêt, pour être rentable, à faire rentrer le patient le jour de l’opération et à le renvoyer chez lui le plus vite possible.
Voilà la médecine d’avenir qu’on nous mijote, au nom du sacro-saint principe d’économicité.
Si vous avez la curiosité d’aller consulter le texte allemand, vous constaterez d’ailleurs qu’il est question de « Wirtschaftlichkeit » qui se traduit en français par rentabilité. Or, économicité et rentabilité ne sont pas synonymes, car faire des économies, en matière d’assurance maladie, devrait signifier dépenser le moins possible pour obtenir une prestation de qualité identique, alors que la rentabilité est le rapport entre le revenu obtenu ou prévu et les ressources employées pour l’obtenir. Il s’agit donc d’un principe qui devrait être étranger à l’assurance sociale, laquelle ne doit pas être rentable, mais efficace au meilleur coût.
De cette manière, les assureurs maladie atteignent un double but : standardiser et uniformiser les coûts hospitaliers par diagnostic, comme ils l’auraient fait si la gestion financière des hôpitaux leur avait été confiée, et imposer parallèlement aux cliniques privées un alignement tarifaire par le biais de conditions générales qui excluent la couverture d’assurance, même en privé ou semi-privé, si le principe d’économicité n’est pas respecté.
Une fois encore, les assureurs maladie font voter les lois qui les arrangent pour atteindre le but qu’ils se sont fixé.
Ce n’est pas le seul exemple. Les assurés tiennent au libre choix de leur médecin ? Qu’à cela ne tienne, parallèlement aux hausses constantes et injustifiées des primes, on va leur proposer des modèles alternatifs, dans lesquels ils renonceront à ce libre choix en échange d’une prime plus basse. Le libre choix deviendra ainsi un luxe que de moins en moins d’assurés pourront s’offrir.
Les apparences sont sauves : ne renonceront au libre choix que celles et ceux qui l’auront accepté « de leur plein gré ».